La convention de procédure participative
La procédure participative permet de régler à l'amiable un différend entre le salarié et l'employeur afin d'éviter un recours au conseil de prud'hommes. Chaque partie est obligatoirement assistée par un avocat. Cette médiation est possible pour résoudre un différend apparu durant l'exécution du contrat de travail ou en lien avec sa rupture.
La procédure participative regroupe le salarié et l'employeur, chacun étant assisté d'un avocat, qui les aide à résoudre leur différend. Le salarié et l'employeur concluent une convention de procédure participative. Celle-ci fixe la durée pendant laquelle ils s'engagent à trouver une solution amiable au litige.
Lorsque la procédure participative permet au salarié et à l'employeur de régler leur différend, ceux-ci concluent un accord avec l'assistance de leur avocat respectif. Cet accord récapitule les éléments résolus dans le cadre de cette procédure.
Pour être valable, l'accord doit porter sur des droits pour lesquels il est possible de négocier. L'accord peut être homologué par le conseil de prud'hommes (avec l'accord du salarié et de l'employeur). Pour obtenir l'homologation, le salarié ou l'employeur saisit le conseil de prud'hommes. Toutefois, il peut refuser de l'homologuer. Il ne peut pas modifier le contenu de l'accord. L'homologation de l'accord lui donne force exécutoire. Ainsi, si une des parties ne respecte pas ses engagements, l'autre partie pourra en demander l'exécution forcée. Si la procédure participative ne permet pas de résoudre le différend, le salarié ou l'employeur peut alors saisir le conseil de prud'hommes. La procédure prud'homale s'applique dans les conditions habituelles (phase de conciliation et d'orientation puis, si besoin, jugement de l'affaire).
Le salarié a-t-il intérêt à s'engager dans une telle voie ?
Le point de vue de Laurent Milet, rédacteur en chef de la Revue Pratique de Droit Social :
L'article 2064 du Code civil dispose que "Toute personne,
assistée de son avocat, peut conclure une convention de procédure
participative sur les droits dont elle a la libre disposition, sous réserve
des dispositions de l'article 2067." Le même article prévoyait
jusqu'alors qu'une telle convention ne pouvait être conclue pour résoudre
les différends qui s'élèvent à l'occasion d'un
contrat de travail entre les employeurs, ou leurs représentants, et
les salariés qu'ils emploient. Cette exclusion se comprend aisément
dans le sens où le contrat de travail est un contrat inégalitaire,
où le salarié se place sous la subordination d'un employeur
en échange d'une rémunération.
La loi du 6 août 2015 dite "loi Macron" (à laquelle
nous consacrons un dossier dans le présent numéro) a supprimé
l'exclusion des litiges du travail de cette procédure participative.
Quelles peuvent en être les conséquences?
Le recours à cette procédure n'est pas obligatoire. Le texte
dit bien qu'il ne s'agit que d'une simple possibilité, comme est utilisée
aujourd'hui la médiation, la transaction, etc.
Qui plus est, cette procédure a un coût pour le salarié
car elle l'oblige à avoir recours à un avocat alors que la procédure
de conciliation prud'homale est gratuite. Enfin, le salarié qui aurait
recours à cette procédure se priverait de son juge naturel car
l'article 2065 prévoit que, tant qu'elle est en cours, la convention
de procédure participative rend irrecevable tout recours au juge pour
qu'il statue sur le litige.
Les salariés n'ont donc aucun intérêt à se faire
hara-kiri et l'on peut légitimement s'interroger sur les raisons qui
pourraient l'amener à négocier ses droits. Le gouvernement a
la réponse: la justice prud'homale est trop lente et, surtout, la conciliation
pas assez efficiente. Et que fait-il pour corriger cet état de fait?
Avec la loi Macron, il continue d'empêcher les conseils de prud'hommes
de fonctionner normalement, pense que les choses iront plus vite si le juge
départiteur s'en mêle plus tôt et légitime, en modifiant
l'article 2064, le recours à une justice privée. La lecture
du Figaro du 18 mai 2015 est, à cet égard, très instructive:
certains avocats proches du patronat ont décidé de créer
un centre national d'arbitrage privé (CNAP) qui propose de régler
les litiges en matière de rupture de contrat de travail plus vite et
plus discrètement. L'auteur de l'article en tire en toute bonne foi
l'analyse qui s'impose : la décision sera sans doute moins favorable
dans son montant pour le salarié qu'au bout d'un processus classique,
mais moins
arbitraire pour les employeurs !
Il convient donc, à mon tour, et en toute bonne foi,
d'en tirer les conclusions suivantes:
- les employeurs aiment bien les juges non professionnels quand ils les choisissent
eux-mêmes mais pas quand ils officient au sein d'une juridiction paritaire;
- ils sont également prêts à trouver une issue à
un litige avec un salarié, mais pas dans le cadre de la procédure
prud'homale gratuite, sans avocat obligatoire, et avec un préliminaire
de conciliation qu'ils considèrent comme arbitraire si le jugement
leur est défavorable;
- ils sont enfin prêts, en grande partie, à prendre en charge
financièrement le recours à l'arbitrage puisqu'ils ont la garantie
qu'en retour "ils se paieront sur la bête", le salarié
étant sans doute amené à transiger en dessous des droits
que lui auraient restitués les conseillers prud'hommes.
Le recours à la procédure participative peut
donc au final s'avérer une grosse arnaque pour le salarié.
Mais elle ne sera pas perdue pour tout le monde car, visiblement, des petits
malins ont flairé la bonne affaire en créant les structures
adéquates qui concurrenceront les prud'hommes. De là à
imaginer qu'ils ont fait du lobbying...
Laurent Milet
Paru dans la Revue
Pratique de Droit Social d'Octobre 2015.
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mise à jour 2 février 2014